L’origine de la souffrance :
Janov met l’accent sur la nécessité pour le sujet de se préserver de souffrances psychiques persistantes qui l’auraient assaillies bébé et enfant face à un environnement insuffisamment bon, soutenant et présent, voire un environnement hostile.
A l’époque où surviennent ces souffrances, l’enfant n’est pas en mesure de les traverser c’est à dire de les ressentir et d’en élaborer la cause. C’est pourquoi il s’en défend en adoptant des comportements spécifiques que Janov a regroupé sous le terme de » moi irréel ». En effet pour survivre à un environnement inadéquat, l’enfant adopte une posture qui l’éloigne de son identité vraie et profonde. Il peut alors refuser de ressentir ce qu’il éprouve en utilisant son intelligence corticale pour décider ce qui est bon pour lui, en accord avec ce que ses parents attendent de lui. Ainsi se construit-il en s’éloignant de plus en plus de sa vraie nature et de ses besoins réels. Cette posture peut lui permettre de traverser l’enfance sans trop d’encombres. Mais les besoins sont là et le manque douloureux s’installe sous la forme d’un mal-être sans qu’il ne sache plus vraiment pourquoi. A l’âge adulte ce mal-être persiste. Le sujet doit alors se défendre de toute situation susceptible de réveiller davantage la souffrance.
Apaiser la souffrance :
Il adoptera des comportements de déjouement qui peuvent se révéler destructeurs (addictions, tension permanente entraînant un stress croissant). En effet certains de ses désirs pourront se révéler impérieux, à l’image du nourrisson qui s’agite frénétiquement à la vue du biberon qui s’approche incapable d’en différer d’un instant l’absorption.
L’adulte agira alors, mu par l’espoir infini de satisfaire enfin ces besoins de bébé ou d’enfant, mais, à la manière d’un shoot d’héroïne, à la satisfaction immédiate succède un manque croissant toujours béant.
Ainsi je me souviens d’un patient qui n’a eu de cesse que de construire des maisons avec chaque fois une chambre supplémentaire, jusqu’à ce qu’en thérapie, il ressente et élabore la manière si douloureuse dont il avait vécu de dormir dans la chambre de ses parents jusqu’à l’âge de 15 ans. Après avoir ressenti et élaboré sa souffrance, accepté que les choses s’étaient passées ainsi et qu’il ne pourrait pas les changer, il a pu consacrer le reste de sa vie à la réalisation de ses vrais désirs.
Refuser la perte :
Ce qui est perdu est perdu: les bras manquants de la mère, ses paroles réconfortantes, le soutien inconditionnel des parents, un père qui nous fait découvrir le monde….Continuer de rechercher cela à l’état brut dans le présent peut entraîner des comportements qui peuvent aussi être très handicapants empêchant le sujet de se confronter aux épreuves ordinaires nécessaires à toute vie investie.
Ainsi, parce que la souffrance du manque d’alors cherche à être écartée, toute situation pouvant nous faire ressentir qu’on a été trop seul pour faire face aux épreuves ordinaires devra être évitée.
Passer des examens, apprendre à conduire, s’investir en adulte dans une relation amicale ou amoureuse, se positionner dans un conflit, etc pourrons devenir des épreuves vécues comme insurmontables et devoir les éviter entrave l’évolution du sujet.